La reconstitution faciale

 

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        1 - Définition

Par reconstitution faciale on entend la méthode permettant, à partir d'un crâne, de retrouver le visage qui  correspondait  à l'individu de son vivant.

2 - But

Il existe deux domaines précis d'application de la  reconstitution faciale :

 

3 - Historique.

    Deux cheminements différents ont permis l'élaboration de procédés de reconstitution faciale d'un individu d'après son crâne. D'une part, la curiosité de connaître le visage véritable de personnages célèbres, dont on avait, par ailleurs, à la fois le squelette crânien et des portraits, d'autre part, le désir de voir à quoi ressemblaient les Hommes fossiles.

    Dès la dernière moitié du XIXe siècle, Welker reconstitue le visage de Schiller (1883), de Raphaël (1884) et de Kant (1888). De son côté, Hiss dès 1895 utilise les moyennes des mesures de l'épaisseur de la peau de cadavres de 24 hommes et de 4 femmes, pour reconstituer le visage de J.S. Bach.
    En 1898, les allemands Kolmann et Buchly approfondissent l'étude de Hiss et élaborent la première méthode scientifique de reconstitution. Contrairement à leurs prédécesseurs, ils ne se contentent pas d' "habiller" un crâne mais ils établissent des mesures précises donnent les repères osseux nécessaires, indiquent les corrélations crânio-faciales, décrivent les différentes étapes permettant de reconstituer un visage à partir de n'importe quel crâne. Ils  travaillent sur 45 hommes et 8  femmes ( âgés entre 17 et 72 ans et décrits comme étant modérément nourris) les mesures ont été effectuées moins de 24 heures après la mort. La méthode consiste à utiliser une aiguille traversant une pièce en caoutchouc. Cette aiguille est introduite dans la chair jusqu'au contact osseux, le manipulateur déplace alors le disque en caoutchouc jusqu'à ce qu'il touche la peau, puis il retire l'aiguille. La distance entre son extrémité et le disque indique alors l'épaisseur des tissus mous à cet endroit. Cette opération est répétée autant de fois qu'il est nécessaire, en des lieux différents et bien précis.
    Kollmann et Buchly prennent même en compte le variation éventuelle de l'épaisseur des tissus mous selon que la personne est très mince, mince ou bien nourrie .Cependant leur technique, encore rudimentaire, ne permet pas d'individualiser la face reconstituée

    On retrouve cette impossibilité, voire même amplifiée, chez ceux qui travaillent sur la reconstitution des traits faciaux de l'Homme Préhistorique.

    Dans les livres anciens ou dans les vieilles encyclopédies, il existe de nombreuses représentations de nos prédécesseurs, fruit de l'imagination de dessinateurs ou même d'érudits de l'époque. Ces fantaisies artistiques sont dénoncées par Marcellin Boule, en 1921: "quelques vrais savants ont publié les portraits en chair et en poils, non seulement d'Homo Neanderthalensis, dont on connaît suffisamment le squelette, mais encore de l'Homme de Piltdown, dont les débris sont fragmentaires "

    Pour Boulle, dans l'état des connaissances de son époque, on avait seulement le droit de reproduire un écorché : la physionomie, la présence ou l'absence de poils, étant laissées à l'imagination du lecteur, le scientifique n'ayant - en effet - aucune donnée pertinente qui lui permette de reconstituer ces éléments.

    C'est en URSS, une vingtaine d'années plus tard que, finalement, grâce à Michaïl M. Gerasimov, va naître une méthode fiable et précise dont la base est, également une mesure des tissus mous. Anthropologue, archéologue et sculpteur, Gérasimov commence ses recherches bien avant la seconde guerre mondiale. Malheureusement une grande partie de ses travaux est détruite lors du conflit, notamment les dessins et les données statistiques. Malgré tout, il peut publier l'essentiel de sa méthode en 1949 et plus particulièrement on 1955 sous le titre "La reconstitution du visage d'après le crâne". Il meurt on 1970, après avoir été de nombreuses années, Directeur de l'institut d'Ethnologie d'URSS, qui abritait justement le laboratoire de Reconstitution Plastique.

    Cet historique ne saurait être complet sans signaler les travaux américains ( Krogman, 1962 - Rhine et Campbell, 1980 - Rhine et Moore, 1982 - Gatliff, 1984 ) qui se sont longtemps inspirés de la méthode de Kollmann et Buchly, avant de développer une technique plus originale.
    En 1986, le laboratoire d'anthropologie de Lyon, crée sa propre méthodologie de reconstitution faciale ( la méthode DMP, initiale, dans l'ordre alphabétique, du nom des trois membres de l'Equipe de Reconstitution Faciale : Desbois, Mallet et Perrot ).

4 -  La méthode DMP.

    4.1 - Genèse.

    En tant qu' Expert en Anthropologie Médico-légale près la Cour d'Appel de Lyon ( depuis 1970 ), Raoul Perrot a été régulièrement amené à déterminer, à partir de vestiges osseux inconnus, les quatre principaux paramètres de l'identification :  sexe, âge, morphophénotype cutané ( "race") et taille. Très vite lui est apparu (comme à  d'autres avant lui d'ailleurs ) le caractère incomplet de l'expertise :  plusieurs individus peuvent correspondre au même signalement sans qu' il soit possible de savoir lequel est le bon. Aussi, très logiquement  s'est imposée  la nécessité de reconstituer les traits du visage, nécessité qui va rester à l'état de projet jusqu'en 1985.

    A cette date, Claire Desbois, étudiante en Chirurgie Dentaire, arrive au laboratoire, pour effectuer sa thèse (1986. La reconstitution du visage d’après le crâne. Thèse de Chirurgie dentaire, Lyon) dont le sujet porte, justement, sur les problèmes de reconstitution faciale ( ce sujet était proposé  par Paul Libourel, Professeur à l'UFR d'Odontologie de Lyon et Expert en Odontologie légale près la Cour d'Appel de Lyon 1 ). Sa connaissance de la langue russe permet  à Claire Desbois de traduire ( pour la première fois an France ) l'ouvrage fondamental de Gérasimov.

    L'année suivante, Claude Mallet, anthropologue associé depuis de longues dates au laboratoire, s'intéresse lui aussi à ces problèmes de reconstitution des traits du visage, en apportant  sa connaissance de la Myostéonomie, branche nouvelle (dont il est d'ailleurs le créateur) et qui consiste à établir les liens entre l'importance fonctionnelle d'un muscle, ses insertions osseuses et les traits du visage.

    De cette association tripartite naît, en 1986,  l'Equipe de Reconstitution Faciale et la méthode DMP.

    4.2 - Organigramme des différentes phases techniques.

4.3.1 - Préparation de la tête.

4.3.2 - Dessins du crâne au dioptrographe cubique.

4.3.3 - Anthropologie du crâne.

4.3.4 - Etablissement des contours du visage (l'importance des standards d'épaisseur) : influence de l' anatomie du crâne, de la corpulence et de l'âge sur l'épaisseur des tissus mous .

            Standards d'épaisseur :  liste des 26 points retenus par la méthode DMP

Points faciaux 

1- Milieu du frontal
2 - Glabelle
3 - Racine du nez
4 - Extrémité des os du nez
5 - Epine nasale
6 - Epaisseur lèvres
7 - Limite lèvre supérieure
8 - Limite lèvre inférieure
9 - Milieu philtrum
10 - Hauteur lèvres
11 - Sillon mentonnier
12 - Saillie mentonnière
13 - Sous le menton

Points sur le profil 

14 - Bosses frontales
15 - Zone supra orbitaire
16 - Zone infra orbitaire
17 - Bord inférieur malaire droit
18 - Bord inférieur malaire gauche
19 - Rebord orbitaire latéral
20 - Milieu arcade zygomatique
21 - Au dessus cavité glénoïde
22 - Ligne occlusale
23 - Gonion droit
24 - Gonion gauche
25 - Au dessus de la molaire M2
26 - Au dessous de la molaire M2

4.3.5. L'étude myostéonomique.

  • Examen des modifications osseuses des insertions des muscles du visage en rapport avec leur activité dans la mimique faciale.
  • Etablissement des rides du visage, permettant d'individualiser la reconstitution faciale .

4.3.6. Le portrait facial.

  • oeil et les paupières.
  • nez.
  • bouche.
  • menton.
  • oreille.

A titre d'illustration des différentes phases pratiques d'une reconstitution faciale.nous renvoyons le lecteur à l'affaire Claude F solutionnée grâce à cette technique.

5 -  Enseignement de la reconstitution faciale.

Dans le cadre du Master1 Recherche Biomédicale, le laboratoire avait la responsabilité administrative et pédagogique du cursus Anthropologie, Ethnologie et  Sociologie de la Santé. Les étudiants choisisant le stage RB26  étaient amenés à reconstituer un visage à partir d'un crâne complet tiré au sort. Le laboratoire avait décidé dès 2009 de présenter sur son site [FACIOTHEQUE] les reconstitutions faciales réalisées chaque année.